Le typhon et moi...

Au menu du jour, cette ravissante et gigantesque depression du nom de Bolaven.

Bolaven est le plus gros typhon que la Corée (et nous avec), auront connu depuis 10 ans.
Faut dire, on avait déjà eu de bons aperçus rien que cette année avec Guchol, Mawar ou Khaneun.
Mais celui-ci nous fut annoncé comme le big one, reléguant tous les autres ou presque à des éternuements de mouche.

Alors pour ce qui est d'être fort on a pas été déçus.
D'abord la vacherie a commencé par s'adjoindre en route un copain, un 2 ème typhon du nom de Tembin.
Et c'est tout frétillant qu'il a atteint notre île le lundi 27 août vers 16 heures.
La saleté nous a pas lâché le crin jusqu'au samedi 14 H.

Les horribles bêtes c'est elles :

Il y a un point commun à tous les gugusses en France qui regardent les images terrifiantes des typhons de la planète bien calés dans leur fauteuil, le whisky (pour ma part ce serait plutôt, du gros rouge) à la main : Ils n'ont aucune idée de ce que c'est vraiment.

Fidèle au grand adage (à l'envers) : " c'est toi qui y est, c'est toi qui dis ", je m'en va vous conter la chose par le menu.

D'abord il y a les bourrasques annonciatrices, et c'est pas la rochelaise d'origine que je suis qui va grimper aux rideaux pour un coup de zéphyr.

Mais le problème c'est que les vents de typhon ne sont pas des vents normaux. Lorsque les premières branches d'arbres, les antennes tv et les enseignes commencent à s'envoler, vous saisissez tout de suite qu'il ne s'agit pas du gros temps de Chatelaillon-plage au 15 décembre.
Puis vient l'assombrissement du ciel, comme si d'un coup le ciel s'enmelait les nuages dans les pinceaux et qu'on soit en réalité à la tombée de la nuit en plein jour.

Puis les bourrasques s'espacent de moins en moins, jusqu'à vous faire un cou de corne continu qui glace le sang, avec son cortège de sifflements et de claquements.
C'est la qu'on se fait clairement la réflexion suivante :
" Et si j'y laissais la peau ".

A ce stade il faut être passablement secoué du ciboulot pour aller oser mettre un pied, même palmé, dehors. C'est pourtant ce que font invariablement pas mal d'étrangers ici, excités comme des puces sous cocaïne à l'idée d'aller faire quelques photos à poster sur facebook pour " témoigner des incroyables et dangereux moments qu'ils vivent à l'autre bout de la planète ".
Ils y court les crétins ! plus vite que si on leur avait posé une bombe aux fesses.
C'est vrai que l'enseigne métallique de Mister Coffee qui emplafonne leur tronche de cake, ca pourrait passionner la terre entière... Enfin.

Revenons à nos moutons (et à nos chèvres, et à nos chevaux, et à nos rênes) ici à Jeju.

Les consignes de sécurité ont été diffusées, par radio, à la telloche, par haut-parleurs, par SMS, et dans la presse écrite toute la journée de la veille. C'est dire que pour pas savoir qu'on allait tous se manger Bolaven à la sauce catégorie 3,  il aurait fallut être mort ou pas ici.

Bien des écoles fermèrent... (mais pas celle de James !)

 On annula tous les vols locaux :

On scotcha toutes les vitres en croix comme recommandé.

On alla acheter des bougies et des provisions pour 2 jours.
On ferma bien toutes les ouvertures.
On barricada notre porte-fenêtre avec table et chaises.

On installa un lit de fortune dans l'endroit le plus protègé de l'appart.
On fit le tour des potes au téléphone pour savoir si tout le monde était bien rentré (Un typhon c'est déjà pas hilarant mais savoir un ami en danger dans ces cas-là, c'est l'enfer).
Nous fumes spécialement inquiet au sujet d'un d'entre eux, injoignable et que nous savions résider dans une maison basse en tôles !
A 17 heures, c'était la réunion de crise. Nous nous donnions encore une heure avant l'arrivee du " plat de résistance ", pour aller repêcher le manquant à l'appel, et lui faire connaître de force les joies de notre beau canapé-lit. On a pas eu à le faire, le zigoto en panne de batterie s'étant refugié à l'abris dans la partie en dur de son habitation.
et puis on attendit.

A 18 h, le déluge arriva enfin. La première peur, ce fut les vitres et les branches des arbres juste en face que nous voyions d'un assez mauvais oeil débouler sur la table du salon.

 

Vers 19 heures, bien décidés à pas se laisser abattre par l'dversite et les cumulo-limbus, on décida de se faire un cassoulet au confit d'oie (miraculeusement retrouvé dans le fond de mon placard) avec un petit rouge tout ce qu'il y a d'honete.
Le tout accompagné de quelques sketch des Monty Python, (rien de mieux dans les moments graves), histoire d'arreter nos allers-retours compulsif à la fenêtre.

Le typhon s'amplifia encore et dura toute la nuit. A plusieurs reprise on se réfugiât dans la salle de bain, complètement tétanisés de trouille. N'arrivant plus à faire la distinction entre les débris qui s'éclatent sur les murs, les rafales ou les vitres qui vivrent dans leur chambranle, en termes de bruit.
Une cacophonie à peine croyable et bien sur plus aucun moyen de s'aprocher des fenêtres pour voir ce qui ce passe dehors.

Les vents atteignirent 180 km/heure sur l'île, ils se deplacerent à la vitesse de 60 mètres/seconde.
Selon les experts, à partir de 15-20 mètres/seconde, les parapluies ne sont plus utilisables.
A 30 mètres/seconde, les arbres sont arraches et les habitations anciennes menacées.
A la vitesse de Bolaven, des corps humains et de gros rochers sont projetés dans les airs.

Le bilan :

25 morts
2 bateaux de pêcheurs chinois avec leur 34 membres d'equipage ont fait naufrage.
200 foyers ont du être évacués et ont perdu leurs maison.
7 blocs d'appartement ont été balayes dans le Jeollanamdo.
2 millions de foyers n'ont plus d'electricite.
Les liaisons de ferry et de l'aérien sont interrompues.
Des arbres, lampadaires et poteaux ont été arrachés un peu partout.

Je n'ose imaginer l'état de désolation des plages, des forets primaires, des hameaux côtiers et des animaux sauvages de l'île ce matin.

Une pensée pour tout ceux en raison de quoi il devient obscène de se plaindre.
Tous ceux qui ont perdu tellement plus que nous.

Et une autre, à toi le futur voyageur qui, s'il vient sur cette île merveilleuse en août ou septembre, devra toujours, mais alors TOUJOURS  t'assurer qu'un avis de typhon n'a pas été lancé.
Au risque d'avoir à vivre exactement le même genre de réjouissance.

La meilleure source d'information en Corée en français pour toute vérification avant le voyage :


http://french.yonhapnews.co.kr/

Bon vent !

Comments

[Greg S.]

Je suis content pour vous.

Dommage pour votre ami. Mais comme tu dis, il ne s'agit que de dégâts matériels.

J'espère pour vous que ça ne va pas recommencer.



A bientôt!

[l'auteur]

Non pas de degats chez nous, mais un ami beaucoup.

Du materiel seulement mais une vraie desolation.



Ah les iles subtropicales, ca se merite vraiment parfois !

Bisous.

[Greg S.]

Bon dieu, cela avait l'air violent.

Pas eu trop de dégâts chez vous?

Tes amis n'en ont pas eu de trop non plus?



Après la chaleur, les moustiques, le typhon. On a eu de la chance l'année passée...